Mon combat contre les acouphènes

Mon combat contre les acouphènes

EMDR, un espoir pour les acouphènes liés à un stress

Le stress post traumatique Dr Anne-Marie PIFFAUT ORL, phoniatre, praticien EMDR Europe, témoigne de son expérience professionnelle lors de la prise en charge psychosomatique des acouphènes invalidants. Une fois les bilans réalisés par un ORL et les traitements classiques suivis et jugés inefficaces par le sujet, que reste-il à faire? L’approche intégrative alliant plusieurs types de psychothérapies, semble donner les meilleurs résultats.

 

 

 

D’après le DSM IV, bible de la psychiatrie moderne, le stress post-traumatique  touche en moyenne 10% de la population et surtout les femmes, les militaires, les victimes de cataclysmes, de harcèlement, d’agressions physiques et sexuelles. .

 

Le cerveau a pour fonction de « digérer » les émotions dont les manifestations sont physiques, biologiques, musculaires, hormonales. Mais dans certains cas, du fait de la gravité des évènements, cette fonction de « métabolisation des émotions » est dépassée. Le traumatisme ne peut pas être mis de côté. Les images de la scène reviennent sous forme de flash back ou de cauchemars. Parfois ce sont des « troubles du caractère » et de l’humeur. La maladie psychosomatique fait aussi partie des conséquences du PTSD[2].

Le PTSD est la cause de nombreux troubles somatiques et fonctionnels.  Le patient  ne peut pas s’habituer. Concernant les acouphènes, il est facile de comprendre l’inefficacité des thérapies d’habituation en cas de stress post-traumatique.

 

  Le but d’une prise en charge psychosomatique globale est de prendre le temps d’analyser l’origine de la souffrance et ensuite de la traiter.

De quelle façon ?

  

EMDR 

La psychothérapie la plus étudiée pour traiter le stress traumatique, se nomme l’EMDR[3]. Elle a fait l’objet de 27 méta-analyses dans le monde. Elle est reconnue par la Haute Autorité de Santé en France depuis 2008.

 

EMDR (Intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires)

Présentation

Le sigle EMDR provient de l'expression Eye Movement Desensitization and Reprocessing, que l'on pourrait traduire littéralement par « désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires ». Toutefois, l'appellation française officielle est intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires – bien que l'on s'en tienne généralement à EMDR.

Mise au point à la fin des années 1980, l'approche de l’EMDR s'est surtout fait connaître pour le traitement des personnes ayant subi de très graves traumatismes et souffrant du syndrome de stress post-traumatique (SSPT), appelé aussi état de stress post-traumatique (ESPT). Grâce au processus neurologique mis en marche, cette approche semble stimuler le cerveau pour qu'il « métabolise » ou « digère » les résidus dysfonctionnels du passé. À la suite de cela, les souvenirs traumatisants perdraient leur charge affective négative, ce qui mettrait fin à la souffrance et aux réactions néfastes (crises de panique, peurs incontrôlées, anxiété, compensations de toutes sortes, etc.).

Plus récemment, les applications de l'EMDR se sont étendues à différents problèmes d'ordre psychique, comme les phobies et la dépression – inspirées dans ce cas par la théorie généralement admise voulant qu'un grand nombre de problèmes personnels découlent d'expériences difficiles vécues dans l'enfance. Toutefois, l'EMDR fonctionnerait mieux avec des patients souffrant d'un seul traumatisme bien cerné ou d'une phobie bien précise, plutôt que d’un trouble plus diffus1. « Il se peut que l'EMDR soit plus efficace dans le traitement des troubles liés au stress qui suit une expérience traumatique (par exemple, la phobie des chiens après une morsure), et moins efficace pour ceux dont le point de départ est inconnu (par exemple, phobie des serpents depuis la naissance) », affirme, à ce propos, le Dr David Servan-Schreiber2.

Une technique apparemment très simple

L'EMDR est une thérapie brève qui suit une procédure rigoureuse pouvant avoir lieu à l'intérieur de quelques rencontres. Bien que la thérapie ait recours à des pratiques psychothérapeutiques classiques, sa caractéristique est l'utilisation de la stimulation double (dual attention stimulation). Tandis que le sujet replonge intensément dans ses émotions stressantes, le thérapeute interrompt périodiquement l'expérience pour provoquer une stimulation sensorielle, comme déplacer rapidement ses doigts devant le visage de la personne. Cette dernière doit alors les suivre des yeux tout en gardant la tête fixe. Le mouvement rythmique des deux yeux serait équivalent à celui qui a lieu spontanément pendant les rêves (la phase de sommeil dite rapid eye movement ou REM). Cette stimulation se répercuterait de manière complexe dans le cerveau, plus précisément dans sa partie la plus ancienne (dans l'évolution humaine) qu'on appelle cerveau limbique ou cerveau émotionnel.

Les thérapeutes disent que, grâce à ces simples procédés, les images, les perceptions et les souvenirs qui étaient codés négativement dans le cerveau émotionnel sont littéralement « recodés » et perdent de leur intensité. Comme si, graduellement, les éléments néfastes étaient « délestés » du système pour être remplacés par des éléments bienveillants. Pour utiliser une autre image, c'est comme si l’on procédait au démontage d'une structure cognitive rigide (les souvenirs et les affects qui leur sont rattachés), pour remonter les éléments dans une association souple et inoffensive.

Normalement, ce processus se produit de façon naturelle et spontanée, ce qui fait que la plupart de nos traumatismes nous laissent peu de traces débilitantes. Mais il arrive que cela ne fonctionne pas à cause de toutes sortes de circonstances (force du traumatisme, sensibilité particulière, période de vulnérabilité physique ou émotionnelle, etc.). On est alors aux prises avec toutes sortes de séquelles. C’est là que l’EMDR entrerait en jeu.

Globalement, l’EMDR vise à engendrer des sentiments positifs, à faciliter la prise de conscience et à modifier les croyances et les comportements3. L’accent est mis à la fois sur les composantes affectives, cognitives et somatiques de l’expérience traumatisante.

Selon les auteurs d’une étude explorant la biologie des traumatismes4, l’originalité de l’EMDR reposerait sur l’association efficace d’une approche centrée sur le corps (mode de réponse aux stimuli et aux sensations) et d’un traitement cognitivo-behavioral (centré sur les pensées et les comportements).

À partir d'une intuition

En 1979, pendant qu'elle est à terminer un doctorat en littérature anglaise à l'Université de New York, Francine Shapiro apprend qu'elle est atteinte de cancer. Parallèlement à ses traitements médicaux, elle se met à explorer les liens entre le stress, l’activité mentale et la maladie, liens mis à jour par les nouvelles découvertes de la psychoneuroimmunologie. En plus de participer à toutes sortes de séminaires et d'ateliers sur le corps-esprit (mind-body) donnés à travers les États-Unis, elle reprend ses études, en psychologie cette fois, et obtient un doctorat.

Mais c'est une intuition, survenue pendant qu'elle se promène dans un parc en ruminant quelques idées noires, qui la met sur la piste de l'EMDR. Tout à coup consciente du fait qu'elle projette nerveusement son regard de gauche à droite, elle se rend compte que la charge négative de ses pensées vient de diminuer. Elle ose donc l'hypothèse d'un lien entre les deux événements. S'ensuivent quelques mois d'expérimentation sur elle-même, puis avec ses proches, et enfin avec ses clients en psychothérapie. Sa première recherche clinique commence fin 19875.

 

La mystérieuse relation émotions/cerveau

On cherche actuellement à mieux comprendre et à valider scientifiquement les processus qui expliqueraient le fonctionnement de l'EMDR. Certains d'entre eux seraient applicables dans d'autres domaines de la psychoneurologie. Parmi les mécanismes que l'on soupçonne être en cause, mentionnons :

  • la synchronisation des hémisphères du cerveau;
  • l’ordonnance systématique des éléments du souvenir que sont l'image, la représentation négative et les sensations physiques;
  • la modification biologique des réseaux de neurones, tandis que de nouveaux circuits sont tracés;
  • l'observation neutre;
  • le déconditionnement par la distraction;
  • un effet hypnotique;
  • les facultés d'autoguérison de la psyché.

Le nom EMDR a été créé en 1987, au moment où les mouvements oculaires constituaient un élément prédominant de la technique. Mais ce nom donne aujourd'hui une idée faussement réductrice de ce qu’est l'approche, celle-ci étant moins simple que le terme ne le suggère. Au fil de l'expérimentation et de la recherche, l'EMDR est devenue, au dire de sa créatrice, une méthodologie complexe qui, si elle était rebaptisée, s'appellerait maintenant Reprocessing Therapy6.

L'EMDR ne fait pas l’unanimité dans la communauté médicale. On rencontre d'ardents défenseurs de cette thérapie parmi les professionnels de la santé. Par exemple, le Dr David Servan-Schreiber écrit dans son livre Guérir : « Je connais peu de choses en médecine aussi impressionnantes que l'EMDR en action »7. Par contre, des études auraient démontré que les mouvements oculaires, pourtant caractéristiques du traitement, ne seraient pas nécessaires au processus thérapeutique8. De plus, des détracteurs de l'EMDR affirment qu'il ne s'agirait que d'une technique cognitivo-comportementale classique vendue sous un emballage séduisant à une population qui veut des solutions rapides9. Malgré cela, de plus en plus d’études semblent confirmer l’efficacité de la technique.

Applications thérapeutiques

 

Tel que mentionné par l’EMDR Institute des États-Unis, la technique est considérée comme un traitement de choix par plusieurs experts en santé mentale pour traiter le syndrome de stress post-traumatique (SSPT)10. Cependant, selon les données les plus récentes de la littérature scientifique, elle ne s’avère pas supérieure aux autres approches psychologiques qui visent spécifiquement ces types de traumatismes11-13.

Globalement, l’EMDR vise à engendrer des sentiments positifs, à faciliter la prise de conscience et à modifier les croyances et les comportements12. L’accent est donc mis sur les composantes émotives, mentales et corporelles de l’expérience traumatisante. La technique facilite l’accès à ces composantes, ce qui permet le début d’une prise en charge et d’un processus de changement. Ainsi, l’EMDR peut être utilisé pour renforcer les ressources internes, aidant ainsi le client à atteindre les changements comportementaux et interpersonnels désirés.

Toutefois, plusieurs critiques négatives ont été formulées concernant la rigueur méthodologique et la validité clinique de certaines recherches sur l’EMDR14-16. En effet, les résultats obtenus varient substantiellement d’une étude à l’autre, selon la population à l’étude et la méthodologie utilisée. Enfin, quelques études seulement font état de suivis à long terme du patient. Bien que la qualité des recherches des dernières années ait augmenté, il est à souhaiter qu’une plus grande attention soit portée à ces limites et que les recherches futures puissent clarifier ces ambiguïtés.

Efficace Réduire le syndrome de stress post-traumatique. L’efficacité des thérapies cognitives comportementales spécifiquement dirigées sur le traumatisme, incluant l’EMDR, a été évaluée dans au moins cinq revues de la littérature scientifique11-13,17,18. La plus récente11 a été basée sur 38 essais cliniques dont 12 portaient spécifiquement sur l’EMDR. Ces approches se sont révélées plus efficaces que les soins usuels pour réduire les troubles associés au syndrome de stress post-traumatique. L’anxiété et la dépression étaient également réduites. Cependant, l’EMDR n’a pas donné de résultats supérieurs aux autres approches centrées sur le traumatisme. La qualité méthodologique des études incluses dans cette revue et le taux élevé de sujets ayant abandonné l’étude viennent toutefois réduire la fiabilité des résultats.

Par contre, trois nouveaux essais cliniques menés auprès de population d’enfants et d’adultes sont venus renforcer les résultats de ces revues14-16. Dans l’un d’eux14, l’efficacité de l’EMDR a été comparée à un antidépresseur et à une pilule placebo chez 88 patients souffrant d’un choc post-traumatique remontant à l’enfance ou à l’âge adulte. Les brèves séances d’EMDR pendant huit semaines se sont révélées plus efficaces que le placebo et que l’antidépresseur. Contrairement à l’antidépresseur, après six mois, l’effet de l’EMDR s’est maintenu, 57 % des patients n’ayant plus de symptômes. Le succès de l’EMDR était beaucoup plus marqué chez les patients souffrant d’un choc post-traumatique remontant à l’âge adulte que chez les sujets dont le choc remontait à l’enfance.

Malheureusement, aucun des auteurs des études portant sur l’EMDR ne s’est attardé à vérifier la présence ou non d’effets secondaires. Finalement, l’efficacité thérapeutique de l’EMDR à long terme demeure controversée. Selon trois études récentes réalisées auprès d’un petit nombre de patients, l’efficacité de l’EMDR se serait maintenue pendant les traitements sur des périodes de 6 mois14, 18 mois19 et 36 mois20. Par contre, d’autres auteurs rapportent que les effets bénéfiques sur les symptômes ne s’étaient pas maintenus six mois14 et cinq ans15 après les traitements.

Efficacité possible Réduire la douleur chronique. Quelques recherches font état du traitement de la douleur chronique à l’aide de l’EMDR. La technique pourrait contribuer à diminuer le seuil de douleur et les émotions négatives qui lui sont associées21. Elle permettrait aussi d’augmenter l’habileté à contrôler cette douleur à la suite du traitement. La manière de percevoir physiquement et émotionnellement la douleur serait également améliorée.

Efficacité incertaine Traiter les phobies. Le peu de données probantes ne permet pas de conclure à l’efficacité de l’EMDR pour traiter les phobies. Bien qu’il semble y avoir amélioration dans certains cas22, d’autres approches, comme l’exposition in vivo (exposition progressive à des stimuli générant la phobie), demeurent le traitement à privilégier pour ce type de problème23.

Autres applications. L’EMDR semble utile dans des conditions de plus en plus variées et des résultats thérapeutiques positifs ont été obtenus auprès de populations diverses10. Voici les applications les plus documentées :

  • enfants et adolescents présentant des symptômes reliés à un traumatisme;
  • victimes de crime perturbées par les séquelles de violentes attaques ou policiers ébranlés par la nature stressante de leur travail;
  • victimes d’agressions sexuelles, pour le retour à une vie normale et à des relations intimes.

Plusieurs études ont aussi cherché à vérifier l’efficacité de l’EMDR pour des troubles anxieux et d’autres affections. Cependant, le peu de littérature scientifique et de recherches relatives à ces sujets ne permet pas d’en arriver à de véritables conclusions.

EMDR (Intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires)

Section Applications thérapeutiques
Recherche et rédaction :
Patrick Barré. B. Ps., Chaire en approche intégrée en santé, Université Laval
Révision scientifique
 : Dr Sylvie Dodin, M.D., M. Sc., Claudine Blanchet, Ph. D. et Dr Isabelle Marc, M.D., M. Sc., Chaire en approche intégrée en santé, Université Laval.
(juillet 2008)

En pratique

Il n'existe pas de praticiens qui sont exclusivement des spécialistes en EMDR. Pour expérimenter cette approche, on doit consulter des professionnels de la santé qui, après avoir reçu une formation adéquate, incluent cet outil dans le cadre de leurs interventions. On trouve sur Internet plusieurs sites qui présentent des listes de praticiens regroupés par régions.

Comment ça se passe?

 

Pendant les séances, au moment des périodes de stimulation double, le thérapeute demande au sujet de se représenter l'événement à l'origine du problème et de maintenir sa concentration. La représentation peut être visuelle, émotionnelle, cognitive ou physique. Elle peut comporter un dialogue sur les perceptions, les émotions et les sensations liées à cet événement, mais pas nécessairement. Ces échanges sont similaires à ceux d'un grand nombre de psychothérapies, à la différence qu'on entre moins dans les détails et que le sujet est constamment invité à évaluer son degré d'inconfort.

 

À certains moments, pendant le processus, le thérapeute soumet le sujet à un stimulus sensoriel touchant les deux côtés du corps. Il peut s'agir de mouvements devant les yeux, de sons de chaque côté de la tête ou de tapotements sur les deux bras. Puis le processus reprend, et ainsi de suite plusieurs fois.

Il existe différentes façons d'utiliser l'approche en fonction des problèmes du sujet. Le processus complet comprend plusieurs étapes, dont une phase de préparation. Le nombre total de rencontres requises varie généralement de 3 à 15. Elles durent de 60 à 90 minutes.



15/09/2011
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